Difficulté d'association syllabique? Peut-on répondre?

Publié le par Jaz

 

AUT 0293Une réponse différée...

 

 

Une maman inquiète écrit en demandant que faire pour sa fille de 10 ans qui semble bien être "dys" tout azimut avec 4 ans de suivis thérapeutiques correspondants à chaque dys (lexie, praxie, calculie, orthographie) et qui résiste encore à lire, appliquer les règles apprises etc... Dans mon expérience, cela m'a paru assez fréquent et l'évocation des problèmes de mémoire de travail ne peut tout justifier.


J'irais chercher du côté de l'absence de flexibilité mentale sur le plan neuro-psychologique et sur le "bindind problem" en ce qui concerne le lien à établir entre deux éléments distincts, à mettre en relation avec le fait que chaque "symbole" proposé n'existe que dans sa matérialité (et non comme symbole), à chaque fois nouvelle figure, dès les lettres, constituant du signe étiquette de de Saussure. Chaque syllabe doit être redécouverte et laborieusement reconstruite par l'enfant qui n'en finit plus de déchiffrer. C'est pourquoi je propose à l'enfant des images métaphoriques et des expériences qui pourraient lui permettre d'aller au-delà de l'apparence, de l'autre côté du miroir en quelque sorte. Il semblerait que pour certains d'entre eux, il n'y ait pas de stage logographique dans l'apprentissage.

J'en citerai deux exemples pour illustrer la façon "technique" dont j'ai procédé pour le travailler, dans une situation donnée, face à un enfant déterminé:

- dans le premier exemple, enfant de 9-10 ans, j'ai attrappé le sac de lettres scripts en plastique (donc formes sans support) et l'ai vidé par terre en les jetant au loin, en jetant ces quelques mots "un caca de lettres, pourquoi faut-il qu'il y en ai tant!" Mars les a ramassées en tas, et les a examinées de près pour retrouver celles qui étaient identiques donc différentes d'autres, avec l'orientation qu'on a choisi ultérieurement pour p/b et d/q, u/n . Dans cet exemple où, de par mon expérience de DL, il n'y avait rien de calculé, l'affect négatif a été évacué par la violence de l'acte et de son commentaire, et l'identification/différenciation a  surgi, ouvrant la voie à l'organisation du "système".

L'image qui introduit l'article est celle de ses premiers mots écrits significatifs avec ces mêmes lettres, ultérieurement. Make now (tout un programme, en anglais sans qu'il le parle, mais ses premiers essais d'écriture au hasard avaient pu être segmentés dans cette langue pour qu'ils prennent sens). papa maman, coca (entraînement au graphisme avec cacaca etc), capucine le nom de sa soeur, puis c'est (son prénom) moi.

 - le deuxième exemple aide à prendre conscience de ces différenciations de façon intuitive par la manipulation (il est emprunté à une graphologue qui travaille avec les gauchers): il s'agit de faire placer un b qu'on forme en pâte à modeler sur une vitre (un rond ou demi-rond et un bâton) et de tourner cette vitre dans l'autre sens puis... de la retourner. Tout s'éclaire: une même forme de base peut devenir tout ce que l'on veut selon comme on la regarde. Cela assure la "permanence" de l'objet concret de base, malgré la reconnaissance que nous avons de son nom selon le point de vue que nous adoptons. La valeur en résulte, transcendant sa matérialité.

 

Sans faire avancer la réflexion théorique d'un grand pas, ces deux exemples sont doublement complémentaires. Ils ouvrent à une autre perspective, celle de la libération des affects qui bloquent un processus évolutif pour le premier, et permettent, dans le second, l'ouverture à la troisième dimension, moteur puissant de l'ouverture à l'imaginaire, qui permet le déplacement non dans un espace plan où n'ont pu s'établir les repères, mais dans la recherche d'un autre point de vue qui est donné par le retournement.

...

Le travail de l'orthophoniste ne fait que commencer car il s'agit, de mon point de vue encore, d'asseoir ces intuitions sur une intériorisation de la dimension systémique du langage écrit pour que les faisceaux de règles, qui révèlent son fonctionnement pour ceux qui apprennent, prennent sens et puissent enfin s'inscrire et se fixer. Et cela peut tout aussi bien concerner le calcul (Illis).

Il s'agit bien de prendre de l'assurance et de gagner en flexibilité. L'ouverture d'une porte ne peut suffire. Elle peut passer par d'autres voies. Chaque histoire d'enfant et chaque relation thérapeutique est différente. Il n'est qu'à consulter les articles en indexant (dans recherche) les noms des enfants présentés sur le site (prochainement un article ici même pour un récapitulatif de ceux du blog), pour le réaliser.


La porte ouverte par Jimminy lui-même n'a été qu'une étape lointaine vers l'ouverture aux apprentissages pour cet enfant en souffrance qui n'arrivait pas à "se" situer dans l'espace temps de son histoire, de sa relation à son père, où l'on devient celui qui peut apprendre, comme avant lui, dans ma pratique, Illis, Tom, Laure, Corine, Noémie et bien d'autres, et, d'une toute autre façon, dans l'ouverture symbolique enfin disponible pour Max lorsqu'il joue avec les mots.

Publié dans Dyslexie

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