Des pénéloppes de l'apprendre (suite)

Publié le par Jaz

ENFIN .....

"Maintenant quand j'écris, je fais attention... si c'est un mot que je connais, j'arrive à "afficher" une image... je l'ai déjà vu écrit." (Youcef)

tout arrive, je n'y croyais plus, mais Youcef...

1) me téléphone pour s'excuser mecredi et confirmer le rendez-vous de samedi
2) m'apporte ses deux carnets: un pour le lexique, un avec les "tableaux" support visuel du système tant phonologique, les lettres pour faire les sons, que syntaxique, l'opposition verbo-nominale avec le groupe du nom figuré sur un des tableaux et le groupe verbal et ses expansions d'un point de vue fonctionnel sur celui qui lui fait face
3) il me dit écrire en se posant des questions... quoi? car il s'exprime, de lui-même


D'où ce miracle
peut-il bien venir ?  Analyse de l'orthophoniste

- D'un seul coup tout notre travail préparatoire a pris sens pour lui et il se l'est approprié
.link

Dans un premier temps link , en reconsidérant
la question de sa méthode de travail, il était passé récemment  de "programmer" à "se programmer". Nous avions ensuite repris le travail sur la voix, la lecture à haute voix... puis étions passés à l'implicite pour induire la référence au contexte, et avions replongé à la source de ses difficultés de différenciation perceptives avec une écoute dichotique... et ce jour-là

Le rapport au temps
Il n'a toujours pas acheté d'agenda et m'explique alors qu'il essaie de se rappeler ce qu'il doit faire.
Je me souviens d'une séance où je lui avais imposé de reconstituer minute par minute ce qui s'était passé pour situer le retard qu'il avait, justifier son incapacité à se rendre là où il voulait ensuite, la nécessité d'être conscient du temps nécessaire pour effectuer tel ou tel déplacement à pied, en bus, y compris une attente potentielle de ce dernier... bref les outils d'une plannification lorsqu'on sort de routines...

Mémoire et représentations
De ce fait, il essaie de compter sur lui en essayant de s'en passer et ne pas oublier de me prévenir en fait partie puisque ce ne peut être une routine (pas de jour et heure fixe).
Il me précise du coup qu'il essaie de se rappeler des mots déjà vus... quand il doit écrire, comme s'il venait de découvrir qu'il en avait déjà vu,
et m'indique le canal qui les fixe (visuel) quand il se les dit (canal auditif), car il les voit écrits dans sa tête, et les recopie en quelque sorte.
Il m'indique ainsi qu'il commence à connecter les deux entrées perceptives dans un espace de représentations pour pouvoir écrire ces mots dans un mouvement qui en stabilise la forme.
Il semble abandonner l'écriture phonétique (avec l'instabilité de certaines différenciations qui perdure) et les omissions de mots et de syllabes en lien avec l'absence de segmentation et/ou d'identification des mots dans leur contexte tant significatif que syntaxique.
 
Le rapport aux autres
A la dernière réunion de BAFA, chacun devait lire un texte. Il a refusé et les autres apprentis éducateurs se sont moqués de lui en disant qu'il ne savait pas lire. Comme toujours, il n'avait pas voulu informer les responsables de sa difficulté... et la fonction "miroir" a fonctionné.
Combien de fois j'avais tenté de lui faire comprendre qu'il pouvait faire confiance à la discrétion des éducateurs de loisirs, sportifs ou de ceux de l'aide aux devoirs et partir à l'heure pour un rendez-vous (souvent sauté ou impossible à programmer) en les informant de son problème... Son prof de français de 5e, à l'origine de la demande de cette prise en charge tardive, ne l'avait pas trahi pour autant.  J'avais du me battre ensuite avec lui pour qu'il accepte le principe d'une demande de tiers temps...

Reste l'évocation...
Il s'excuse de n'avoir pas eu le temps de trouver les homophones demandés il y a 3 semaines, comme nous l'avions fait pour pair, père, paire et posé ver/fer etc...
Nous reprenons le carnet et il commence à s'intéresser aux stratégies de recherche que je lui propose.
- Le dictionnaire. Il n'a pas encore l'idée de chercher une graphie différente pour le son è alors que les premières pages de son carnet nous avons recherché et trouvé des mots en ai (long entrainement sur un logiciel illustré l'année précédente).
- Je lui donne des pistes. Il se souvient, avec un sourire, du travail de langage lorsque nous avions repris sur le fourgon (langage en images pour sourds), le vocabulaire de la pêche, pour trouver pourquoi il y a "fer" dans "ferrer" un poisson car il ne peut trouver de lui-même les figements "fer à cheval" (porte-bonheur oui mais pas pour un cheval), "chemin de fer" (dans SCNCF), il faut les reconstituer à partir du sens, car elles ne lui disent rien...
Ainsi, pour la première fois, il semble participer et presque curieux. Il y trouverait même un certain plaisir.

Que devient la lecture?
Plus d'un mois qu'il n'a pas lu, il va s'y remettre, se rendant compte qu'il lui faudra repenser sa façon de lire, non seulement pour mieux lire à haute voix, mais pour élargir le champ de ces mots qu'il connait, peut se représenter, pour pouvoir les écrire.

L'heure de la séance y est passée, mais que faire pour reprendre les stratégies de lecture maintenant qu'il est prêt, dans ces trop rares séances qui ne sont même pas hebdomadaires, sans travail personnel jusqu'alors... Orthographe et/ou lecture comment faire les deux?

 Comment construire une image des mots qu'il ne re-connait pas?
Nous récapitulons ce qu'il peut faire pour l'instant face à la forme d'un mot inconnu?
Segmenter : Le dire à haute voix en le syllabant
Se représenter: FERMER LES YEUX
- l'entendre en syllabe
- le voir écrit
Je n'ai pas repris la question du sens, accessible par le contexte, et le travail des racines (qui ouvre aux familles de mot et à la catégorisation en langue) qu'il ne peut encore faire seul.

Publié dans Dyslexie

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